RADAR LANAUDOIS



En 2018, 53,1 % des étudiants à temps plein âgés de 15 à 29 ans de Lanaudière occupaient un emploi1.

Faits saillants

De 2009 à 2016, le taux d’emploi chez les étudiants lanaudois a presque toujours été inférieur à celui de l’ensemble du Québec. Toutefois, une hausse importante s’est amorcée depuis 2015 et les deux dernières années affichent des taux supérieurs de plus de cinq points de pourcentage par rapport au taux de l’ensemble du Québec. Malheureusement, les données régionales à partir de 2019 ne sont pas encore disponibles, mais celles du Québec laissent entendre que les taux d’emploi chez les étudiants sont à la hausse et atteignent alors les niveaux observés avant la pandémie. Il est cependant trop tôt pour dire si cette tendance va se poursuivre. En ce qui concerne le nombre moyen d’heures hebdomadaires de travail chez les étudiants à temps plein, les valeurs régionales ont suivi celles de l’ensemble du Québec pour la plupart des années depuis 2009, à l’exception de 2015 et 2018, pendant lesquelles les étudiants lanaudois ont travaillé en moyenne plus d’une heure de plus par semaine que les étudiants québécois. En 2016-2017, les proportions des élèves de Lanaudière-Nord occupant un emploi durant l’année scolaire sont significativement plus élevée aussi bien chez les filles que chez les garçons. Pour ce qui est des garçons de Lanaudière-Sud, ils sont significativement moins nombreux, en proportion, que ceux de l’ensemble de la province à occuper un emploi. Les filles de Lanaudière-Nord se démarquent, quant à elles, en ce qui a trait au nombre élevé d’heures de travail : en effet, elles sont plus nombreuses que les autres filles du Québec, en proportion, à avoir travaillé au moins 16 heures par semaine durant l’année scolaire. Ces données régionales suivent les tendances observées par d’autres chercheurs, à savoir que les filles sont généralement plus nombreuses, en proportion, à être sur le marché du travail tandis que les garçons, lorsqu’ils ont un emploi, travaillent un plus grand nombre d’heures par semaine5.

Explication et analyse

L’Enquête sur la population active (EPA) est une enquête mensuelle réalisée par Statistique Canada afin de fournir des informations sur les grandes tendances du marché du travail, comme le taux d’activité, le taux d’emploi et le taux de chômage. Elle recueille des données sur les personnes âgées de 15 ans et plus et fournit des estimations nationales, provinciales et régionales. Le taux d’emploi annuel des étudiants à temps plein âgés de 15 à 29 ans est calculé en prenant la moyenne des taux mensuels sur la base des mois d’études (septembre à avril). Il correspond à la proportion du nombre de personnes occupées par rapport à la population de ce groupe. En ce qui concerne le calcul du nombre moyen d’heures de travail, seuls les étudiants qui ont déclaré occuper un travail sont pris en compte. Par ailleurs, les données portant sur l’emploi des jeunes du secondaire proviennent, quant à elles, de l’Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire (EQSJS). On y retrouve le statut d’emploi des jeunes ainsi que la proportion des élèves travaillant plus de 16 heures par semaine, parmi ceux et celles occupant un emploi durant l’année scolaire.

La littérature scientifique récente permet d’identifier plusieurs effets bénéfiques du travail pendant les études, notamment la possibilité de développer le sens des responsabilités, de l’organisation et de l’autonomie; de mieux cerner ses intérêts professionnels; ainsi que de se sentir valorisé6. Cependant, d’autres chercheurs soulignent, au contraire, que le travail rémunéré durant l’année scolaire peut affecter la réussite, réduire l’engagement et la motivation scolaires et augmenter le risque de décrochage7. Plus spécifiquement, des difficultés liées à la planification et à la gestion, des difficultés liées à l’état de santé et des difficultés liées au rendement à l’école ou au travail peuvent être observées chez les jeunes du secondaire qui occupent un emploi8. Or, puisque le nombre d’heures de travail semble être un facteur de risque9, la recherche d’un équilibre entre les études et le travail doit être trouvée, d’où l’importance d’avoir une bonne conciliation études-travail.

Les analyses effectuées à partir des données de l’EQSJS tendent à démontrer que certains facteurs sociodémographiques, économiques et scolaires sont associés à une plus grande proportion de jeunes occupant un emploi à raison d’au moins 16 heures par semaine. En effet, parmi l’ensemble des élèves en emploi, ceux qui vivent dans une famille monoparentale, ceux dont les parents ont un niveau de scolarité inférieur au diplôme d’études secondaires ou sont sans emploi, ceux qui estiment que leurs notes sont sous la moyenne ainsi que ceux qui fréquentent une école située dans un milieu socioéconomique plus défavorisé, sont proportionnellement plus susceptibles de travailler au moins 16 heures par semaine durant l’année scolaire10. Ces résultats vont dans le même sens que d’autres recherches qui suggèrent que certaines trajectoires peuvent favoriser l’entrée précoce des jeunes sur le marché du travail11.

Les contraintes liées au travail peuvent être considérablement diminuées grâce à la présence de facteurs protecteurs. Ces derniers peuvent être de nature personnelle (gestion efficace du stress, ambition professionnelle claire ou engagement à l’égard de ses études), familiale (encouragement et implication des parents dans la vie scolaire de l’enfant) et environnementale (entourage composé d’amis studieux ou environnement scolaire qui favorise l’excellence). L’étudiant est responsable de son propre développement, mais doit également bénéficier d’un soutien parental et scolaire constant pour atteindre ses objectifs12.

Certains facteurs sont associés à une conciliation études-travail plus facile pour les élèves en emploi. À ce titre, notons entre autres :

  • Un emploi présentant une faible demande psychologique;
  • Un nombre d’heures de travail peu élevé;
  • Un emploi pour lequel l’employeur offre un bon soutien social à l’employé;
  • Un horaire de travail flexible, c’est-à-dire que l’étudiant peut s’absenter au besoin, peut limiter volontairement son temps de travail, est consulté avant d’établir l’horaire de travail, peut s’arranger avec ses collègues pour modifier son horaire de travail, a la possibilité d’effectuer ses travaux scolaires pendant les heures de travail et n’a pas à faire un nombre minimal d’heures de travail pour pouvoir garder son emploi;
  • Une décision de travailler prise par choix et non par obligation;
  • Au moins une journée de congé par semaine (sans cours ni travail)8.

Plusieurs de ces facteurs concernent les employeurs. Ces derniers ont un rôle important à jouer afin que l’emploi occupé par leurs étudiants ne nuise pas à leur persévérance scolaire. Afin d’accompagner et de soutenir les employeurs dans la conciliation travail-études, le Comité régional pour la valorisation de l’éducation (CREVALE) offre un programme unique à Lanaudière. En effet, depuis 2006, le programme de certification OSER-JEUNES permet la reconnaissance et la mise en valeur des employeurs qui valorisent l’éducation et qui facilitent la conciliation travail-études de leurs employés. Au 5 février 2023, ce sont 3 055 jeunes qui travaillent au sein des 358 lieux d’affaires certifiés dans la région. Il est à noter que, depuis la création de ce programme, on compte plus de 660 lieux d’affaires lanaudois qui ont été certifiés et sensibilisés à la conciliation études-travail. En outre, une politique encadrant le travail étudiant a d’ailleurs été rédigée pour les employeurs adhérant au programme OSER-JEUNES. Suivant cette politique, les employeurs s’engagent à mettre en place et à respecter certaines pratiques, notamment de ne pas faire travailler un étudiant durant la nuit ou durant les heures de classe, de fournir l’équipement de protection nécessaire à l’accomplissement des tâches ou encore de s’intéresser au parcours scolaire de leurs employés étudiants. Pour que la politique soit applicable, l’étudiant doit collaborer et communiquer clairement ses besoins et ses disponibilités13.

Depuis 2020, une forte pénurie de main-d’œuvre est constatée dans de nombreux secteurs de notre économie. Dans ce contexte, il y a lieu de vérifier rapidement s’il y a une augmentation des heures travaillées et si l’horaire qui en découle contrevient à la conciliation études-travail. On se doit également de s’assurer que les jeunes travailleurs ont accès à un environnement de travail sécuritaire et exempt de blessures14.

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  1. Les données sur le taux d’emploi et le nombre moyen d’heures de travail des étudiants proviennent de Statistique Canada, Enquête sur la population active, 2009 à 2018. Adapté par l’Institut de la statistique du Québec. (2020). Regard statistique sur la jeunesse : état et évolution de la situation des Québécois âgés de 15 à 29 ans, 1996 à 2018. Édition 2019, mise à jour. https://statistique.quebec.ca/fr/fichier/regard-statistique-sur-la-jeunesse-etat-et-evolution-de-la-situation-des-quebecois-ages-de-15-a-29-ans-1996-a-2018-edition-2019.pdf
  2. Les données provinciales portant sur le taux d’emploi des étudiants proviennent de Statistique Canada. (2023). Tableau 14-10-0081-01 Taux de chômage, taux d’activité et taux d’emploi selon le genre d’étudiant durant les mois d’étude, données annuelles [tableau de données]. https://doi.org/10.25318/1410008101-fra
  3. Les données portant sur l’emploi des jeunes du secondaire proviennent de l’Institut de la statistique du Québec, Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire, 2016-2017. Rapport de l’Infocentre de santé publique du Québec. Mise à jour le 4 décembre 2018, disponibles sur SYLIA – Statistiques régionales, Centre intégré de santé et de services sociaux de Lanaudière, Direction de santé publique. https://www.cisss-lanaudiere.gouv.qc.ca/fileadmin/internet/cisss_lanaudiere/Documentation/Sylia_statistiques_regionales/Marche_du_travail/Exp_trav_EQSJS.xlsx
  4. Les données portant sur le nombre d’heures de travail proviennent de l’Institut de la statistique du Québec, Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire, 2016-2017. Rapport de l’Infocentre de santé publique du Québec. Centre intégré de santé et de services sociaux de Lanaudière, Direction de santé publique, Service de surveillance, recherche et évaluation, demande spéciale, le 31 mars 2022.
  5. Gauthier et Labrie, 2013, cités dans Berthelot, M. (2018). Expérience de travail et blessures liées à l’emploi. Dans Neill, G. (dir.), Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire 2016-2017. Résultats de la deuxième édition : la santé physique et les habitudes de vie des jeunes (tome 3, p. 64). Institut de la statistique du Québec. https://statistique.quebec.ca/fr/fichier/enquete-quebecoise-sur-la-sante-des-jeunes-du-secondaire-2016-2017-resultats-de-la-deuxieme-edition-tome-3-la-sante-physique-et-les-habitudes-de-vie-des-jeunes.pdf
  6. Staff et coll., 2009; Greve et Seidel, 2014; Houshmand et coll., 2014; Mortimer, Harley et Staff, 2002, cités dans Berthelot, M. (2018). Expérience de travail et blessures liées à l’emploi. Dans Neill, G. (dir.), Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire 2016-2017. Résultats de la deuxième édition : la santé physique et les habitudes de vie des jeunes (tome 3, p. 64). Institut de la statistique du Québec. https://statistique.quebec.ca/fr/fichier/enquete-quebecoise-sur-la-sante-des-jeunes-du-secondaire-2016-2017-resultats-de-la-deuxieme-edition-tome-3-la-sante-physique-et-les-habitudes-de-vie-des-jeunes.pdf
  7. Largie et coll., 2001; Santana et coll., 2005; IRC, 2013, cités dans Marquis, G. et Bellehumeur, P. (2015, septembre). Conciliation travail-études au secondaire : la situation dans Lanaudière. On surveille pour vous, Bulletin d’information lanaudois, 39, 1-2. https://www.cisss-lanaudiere.gouv.qc.ca/fileadmin/internet/cisss_lanaudiere/Documentation/Sante_publique/Themes/Portraits_populationnels/OSPV-2015-39-Conci-Tr-Etud-Sec.pdf
  8. Gaudreault, M. M., Tardif, S. et Laberge, L. (2019). Renforcer le soutien aux étudiants et aux entreprises en matière de conciliation études-travail-famille. ÉCOBES – Recherche et transfert, Cégep de Jonquière. https://ecobes.cegepjonquiere.ca/media/tinymce/Rapport_SoutienCETF_Avril2019.pdf
  9. Berthelot, M. et Traore, I. (2016, juin). Le travail rémunéré pendant les études et la santé mentale des jeunes : le nombre d’heures travaillées compte. Zoom santé, 59. https://statistique.quebec.ca/fr/fichier/no-59-le-travail-remunere-pendant-les-etudes-et-la-sante-mentale-des-jeunes-le-nombre-dheures-travaillees-compte.pdf
  10. Berthelot, M. (2018). Expérience de travail et blessures liées à l’emploi. Dans Neill, G. (dir.), Enquête québécoise sur la santé des jeunes du secondaire 2016-2017. Résultats de la deuxième édition : la santé physique et les habitudes de vie des jeunes (tome 3, p. 64). Institut de la statistique du Québec. https://statistique.quebec.ca/fr/fichier/enquete-quebecoise-sur-la-sante-des-jeunes-du-secondaire-2016-2017-resultats-de-la-deuxieme-edition-tome-3-la-sante-physique-et-les-habitudes-de-vie-des-jeunes.pdf
  11. Ledoux, É., Busque, M.-A., Auclair, J. et Laberge, L. (2019). Entrée précoce sur le marché du travail à 13 ans et répercussions sur la SST des jeunes occupant un emploi à 15 ans (Rapports scientifiques, rapport noR-1059). Institut de la recherche en santé et en sécurité du travail (IRSST). https://www.irsst.qc.ca/media/documents/PubIRSST/R-1059.pdf?v=2022-11-18
  12. Dumont, 2007, citée dans Marquis, G. et Bellehumeur, P. (2015, septembre). Conciliation travail-études au secondaire : la situation dans Lanaudière. On surveille pour vous, Bulletin d’information lanaudois, 39, 1-2. https://www.cisss-lanaudiere.gouv.qc.ca/fileadmin/internet/cisss_lanaudiere/Documentation/Sante_publique/Themes/Portraits_populationnels/OSPV-2015-39-Conci-Tr-Etud-Sec.pdf
  13. La description du programme OSER-JEUNES provient du site web https://www.oser-jeune.org/
  14. Un récent rapport gouvernemental portant sur la présence des jeunes sur le marché de travail révèle une hausse fulgurante du nombre d’accidents au travail et contient plusieurs recommandations afin de baliser les conditions dans lesquelles s’effectue le travail. Le rapport est disponible à l’adresse https://www.travail.gouv.qc.ca/fileadmin/fichiers/Documents/cctm/Avis/AV_travail-enfants_MTRAV.pdf